
Compteur intelligent : à quoi s’attendre ?
Le compteur intelligent, un sujet qui fait débat. Si certains l’encensent pour son exactitude et ses fonctionnalités automatisées (comme le relevé de compteur), d’autres s’alarment sur ses dangers potentiels (électrosensibilité, respect de la vie privée, etc.). Nous nous penchons sur la question pour démystifier ce petit boitier qui suscite tant de controverses.
En juillet 2018, les Parlements Wallon et Bruxellois ont voté pour l’installation de compteurs intelligents — aussi appelés compteurs communicants. La Flandre a rejoint le wagon un an plus tard. Les trois régions répondent ainsi à une directive européenne qui veut étendre l’adoption de ces compteurs dans toute l’Union.
Pourtant, si l’on compare avec d’autres pays européens comme l’Italie, les régions belges ont entamé cette démarche relativement tard. Pionnière en la matière, la « botte de l’Europe » a en effet installé ses premiers « smart meters » en 2001. Il était donc temps pour la Belgique de rattraper son retard !
Désormais, les consommateurs belges n’auront donc plus le choix. Dès 2023 et jusqu’en 2030, les compteurs communicants feront progressivement leur entrée dans nos foyers. En cas de remplacement de compteur ou de nouveau raccordement, on installera donc systématiquement un compteur intelligent.
Mais avant toute chose, qu’est-ce qu’un compteur intelligent ? Comment ces appareils fonctionnent-ils ? Qui est concerné par leur installation ? Quels sont leurs avantages et leurs inconvénients ? Et enfin, quelle est la situation aujourd’hui ?
Qu’est-ce qu’un compteur intelligent et comment fonctionne-t-il ?
Le compteur intelligent est un compteur électrique capable de recevoir et de transmettre des données à distance et à intervalles de temps réguliers. Concrètement, il s’agira surtout de l’envoi automatisé de vos index de consommation d’énergie. Utilisant une technologie « smart », ce type de compteur a pour but de mieux gérer les flux de consommation d’électricité ou de gaz sur le réseau.
Au niveau de la technologie, il en existe deux :
- Les boitiers (comme le compteur « Linky » développé en France par Enedis) qui fonctionnent en propageant des ondes via le réseau électrique (CPL),
- Les boitiers qui communiquent grâce au réseau de téléphonie mobile (technologie GPRS).
En Flandre, le nombre de consommateurs qui en sont déjà équipés se compte en millions et progresse à grande vitesse. À Bruxelles et en Wallonie, les particuliers munis de compteurs intelligents sont plutôt de l’ordre des dizaines de milliers ou des centaines de milliers. Ce type de compteur est déjà bien répandu parmi les professionnels dans ces deux régions.
Au sud du pays, le prix de l’achat et du placement d’un compteur intelligent se situe entre 154 et 160 €, hors TVA. Depuis le 1er janvier 2024, les primes qui compensaient intégralement ces frais ont été supprimées. À Bruxelles et en Flandre, le compteur communicant et son installation sont pris en charge par le gestionnaire de réseau et ne coûtent donc rien aux particuliers, même sur demande.
En raison des différentes approches dans les trois régions, difficile de parler de déploiement à grande échelle à travers le pays.
- En Flandre, le GRD Fluvius remplace compteur après compteur, quartier par quartier, depuis 2019. En février 2023, ce ne sont pas moins de 2 millions de compteurs intelligents qui sont reliés au réseau. Ainsi, la région semble tenir son objectif de munir 80 % de tous les points de fournitures de ce type de compteur d’ici fin 2024, et 100 % d’ici fin 2029.
- En 2018, la Wallonie a lancé une phase de test après avoir approuvé le passage au compteur communicant. Depuis ce moment, le compteur est installé systématiquement pour certaines niches prioritaires et dans certains cas bien définis. L’objectif est d’équiper 80 % de ces clients prioritaires d’ici 2030. Les particuliers hors de ces cibles peuvent néanmoins faire une demande d’installation de compteur intelligent à leur GRD. En février 2023, la Wallonie compte environ 155.000 compteurs installés.
- Tout comme dans le sud du pays, la région de Bruxelles-Capitale avait lancé une courte phase de test en 2018 avec l’ambition d’un déploiement généralisé. Sibelga, le GRD bruxellois, semble suivre l’exemple wallon et se focalise sur des groupes de clients prioritaires. En février 2023, le nombre de compteurs intelligents installés est estimé à 40.000.
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Qui est concerné par l’installation de compteurs électriques intelligents ?
Depuis 2020, les GRD wallons installent des compteurs communicants chez les nouveaux prosumers et en cas de nouvelles installations électriques. Ce déploiement s’est accéléré à partir de l’année 2023 : le compteur intelligent est désormais installé systématiquement chez les clients en défaut de paiement (il remplace le compteur à budget traditionnel), en cas de remplacement de compteurs obsolètes et chez les clients qui en font la demande. D’ici 2030, 80% des « gros » consommateurs wallons (ayant une consommation énergétique annuelle égale ou supérieure à 6.000 kWh) et des prosumers dont l’installation possède une puissance supérieure ou égale à 5 kWe verront en priorité leur compteur électrique traditionnel remplacé. On notera que la mesure s’applique également pour les particuliers possédant une borne de recharge pour leur véhicule électrique.
Pour les consommateurs bruxellois, la situation est assez similaire : le compteur intelligent est installé en priorité lors de nouveaux raccordements électriques, de grosses rénovations et en cas de remplacement d’un vieux compteur analogique. Sont également ciblés en priorité les consommateurs possédant des véhicules électriques, une batterie électrique, une pompe à chaleur ou ceux qui consomment simplement plus de 6.000 kWh d’électricité annuellement.
En Flandre, le déploiement vise tous les raccordements, rue après rue, quartier après quartier, ville après ville. Le compteur intelligent ne peut être refusé et empêcher le GRD Fluvius de procéder à son installation peut mener à des amendes salées. Seuls les prosumers encore équipés d’un compteur qui tourne à l’envers peuvent encore retarder le remplacement de celui-ci jusque fin 2024 à condition que leurs panneaux aient été mis en service avant 2021 et que ces derniers n’aient pas plus de 15 ans.
Pourquoi (ne pas) installer un compteur intelligent ?
- Relevé des index de consommation à distance ;
- Facturation sur base de la quantité d’énergie réellement consommée ;
- Prépaiement plus simple en ligne avec la disparition des cartes de rechargement :
- Détection plus rapide et automatique des pannes ;
- Possibilité d’organiser sa consommation en fonction des prix du marché (et éventuellement, de vous inviter à changer de fournisseur d’énergie) ;
- Vue plus précise sur les données de consommations, ce qui est particulièrement utile en cas de déménagement.
- Ondes électromagnétiques générées par les compteurs ayant un impact négatif sur la santé selon certains. C’est ce que l’on appelle l’électrosensibilité. Bien qu’elle soit controversée et mise sur le compte de l’effet nocebo, le gouvernement flamand choisit de prendre la problématique « au sérieux parce qu’il s’agit de véritables maux qui affaiblissent la qualité de vie et le bien-être » des patient qui déclarent en souffrir. Il s’avère toutefois que les compteurs intelligents émettent moins d’ondes électromagnétiques que de nombreux appareils du quotidien. Malgré tout, une version câblée du compteur peut être installée chez les Flamands intolérants aux ondes électromagnétiques qui en font la demande.
- La collecte et le transfert de données (qui consomme quoi à quel moment de la journée) ainsi que leur utilisation commerciale, soulèvent, pour beaucoup, la question du respect de la vie privée. Toutefois, les consommateurs auront le choix d’accorder ou non à leur fournisseur ou GRD l’accès à leur données de consommation.
- La coupure à distance de l’électricité, rendue possible par ces compteurs intelligents, menace d’aggraver la situation déjà précaire des ménages en défaut de paiement.
Les réticences sont-elles fondées ?
Compteur Linky, impopulaire en France
Malgré les moyens mis en œuvre, l’adoption du compteur « Linky » peine à s’imposer en France. La raison la plus couramment invoquée est le danger que les ondes émises peuvent présenter. Des études démontrent pourtant que celles du « Linky » sont inoffensives. D’autres consommateurs français se plaignent également de leur facturation ; celle-ci serait plus élevée pour une même consommation depuis qu’ils possèdent un compteur intelligent. Enfin, la question de la vie privée fait vivement débat également. Le débat reste donc animé en France.
En Belgique, le débat du tarif prosumer pour les propriétaires de panneaux photovoltaïques
En Belgique, les oppositions semblent moins virulentes, mais elles n’épargnent pas le boitier « smart » pour autant. Dans notre plat pays, ce n’est pas tant l’électrosensibilité qui est au cœur des discussions, mais plutôt la situation des prosumers.
En effet, un compteur intelligent cadre avec la politique du « tarif d’injection », déjà présent en Flandre et à Bruxelles, qui est critiqué par les propriétaires de panneaux photovoltaïques, car moins rentable.
La fin du compteur qui tourne à l’envers
Jusqu’à la fin de l’année 2024, en Wallonie et en Flandre, les prosumers profitaient d’un système de compteur qui tourne à l’envers. En d’autres termes, cela leur permettait de contrebalancer l’énergie qu’ils prélevaient sur le réseau de distribution d’électricité avec celle qu’ils y injectaient avec leurs panneaux. De cette façon, ils pouvaient faire baisser leur facture annuelle d’électricité.
Le déploiement du compteur intelligent annonce l’arrivée future du système d’injection en Wallonie, mesurable au moyen d’un compteur double flux (analogique ou numérique/intelligent). Ce dernier permet de quantifier l’énergie effectivement prélevée et injectée sur le réseau. Et de facturer séparément le prélèvement d’électricité du réseau et l’injection, dont le prix de rachat est inférieur au tarif de prélèvement. Pour rentabiliser autant que possible son installation photovoltaïque avec ce système, les mots-clés sont autoconsommation et autosuffisance.
On comprend dès lors un peu mieux pourquoi ces nouveaux compteurs n’ont pas la cote.
Un outil incontournable de la transition énergétique qui fait pourtant débat
Cela fait plus de 15 ans ans que la Commission Européenne presse les États membres à déployer les compteurs intelligents sur leur territoire.
Si en 2012, l’évaluation des coûts-bénéfices s’était révélée négative, une actualisation de l’étude (réalisée par la CWaPE) a rendu indispensable son déploiement en raison de l’arrêt de fabrication des compteurs traditionnels, mais aussi de l’urgence de répondre aux prochains défis de la transition énergétique.
« En 2012, les gestionnaires de réseaux avaient conclu que le déploiement massif des compteurs intelligents ne se justifiait pas. Économiquement, cela ne semblait pas rentable, avec très peu d’économies d’énergie engendrées. Mais aujourd’hui, on pense qu’il faut les installer, plus ou moins progressivement selon les cas »
L’étude de la CWaPE sur laquelle s’appuie le ministre prévoit un maintien des compteurs à budget et un déploiement sur 30 ans. Pour lui, ces deux facteurs conditionnent l’obtention d’un coût nul… Or, la fabrication des compteurs à budget a déjà été arrêtée en Wallonie et le scénario retenu par le gouvernement prévoit un déploiement sur 15 ans.
Ainsi, pour ses détracteurs, si les lobbys sectoriels tireront beaucoup d’avantages de ce projet de déploiement massif des compteurs communicants, ce sont les consommateurs et contribuables wallons qui pourraient, in fine, en payer la facture.
Compteur intelligent : indispensable pour la future gestion de nos consommations ?
C’est donc aux consommateurs de se montrer proactifs en tirant profit d’un changement désormais devenu inévitable. De fait, si ces compteurs communicants peuvent présenter une série d’inconvénients, ils pourraient également nous aider concrètement à réaliser des économies d’énergies. Avec plus de données communicantes concernant la production et la consommation d’énergie, il est en effet possible de mieux rentabiliser les installations d’énergie renouvelable et d’optimiser notre consommation d’électricité durant les heures creuses du réseau
Sources
Sources :
- Sibelga
- Parlement Wallon
- Commission Européenne
- CWaPE
- Le parlement wallon approuve le déploiement des compteurs intelligents (La Libre) ;
- La Belgique s’apprête à généraliser les compteurs d’électricité communicants (La Libre) ;
- Le compteur électrique intelligent bientôt dans votre cave (RTL) ;
- La Belgique va généraliser les compteurs d’électricité intelligents (RTBF) ;
- Bientôt des compteurs électriques « intelligents » en Belgique : quels consommateurs devront s’en équiper? (RTL) ;
- Compteurs communicants : un déploiement massif serait inutile, coûteux et dangereux (Le Soir) ;
- Compteurs Linky : une étude a mesuré les niveaux maximums d’ondes radioélectriques émises (SciencePost)
- Lalibre.be
Contenu
- Qu’est-ce qu’un compteur intelligent et comment fonctionne-t-il ?
- Qui est concerné par l’installation de compteurs électriques intelligents ?
- Pourquoi (ne pas) installer un compteur intelligent ?
- Les réticences sont-elles fondées ?
- Un outil incontournable de la transition énergétique qui fait pourtant débat
- Compteur intelligent : indispensable pour la future gestion de nos consommations ?
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